vendredi 9 août 2013

Installation Monolithe et Bac à Sable 2013 Port Barcarès

Bon, ici, vous trouverez les textes écrits pour les installations et autres oeuvres plastiques d'Aurélien, un ami plasticien. Il préfère que je dise Aurecrea, c'est son nom d'artiste. 
En général, on se retrouve autour d'un café dans la cuisine et on papote, on rêve, on déborde, déforme, tord, retord, s'insurge, dégurgite, palpite, précipite. Et on écrite à quatre mains ! 

Et puis quand il est parti, je prends le temps de réécrire le projet que je lui envoie. Et souvent on re-papote, rêve, déborde, déforme, tord.. ect 


Je vous propose en lecture les écrits des projets :
- Installation Monolithe et Bac à Sable, la dernière en 2013 pour laquelle nous avons fait une Lecture/ Performance à Port-Barcarès avec le musicien Nicolas : voir rubrique dans les libellés.

- Et puis Les Détableauïdes Dépivotés que vous verrez peut-être sur les toits des maisons, des immeubles, des parkings, des abris-bus, dans les jardins, les cimetières, les stades, les écoles

Aventurez-vous sur le blog d'Auré pour voir les oeuvres en vrai  : 

http://alalinarde-aurelien-aurecrea.over-blog.com

Et puis la dernière, c'est le Projet Ernest en gestation pour 2014 !


  • Aventure Bac à sable et Monolithe 


1. Bac à sable : Un premier cimetière.

Contenu et Démarche :

Au rez-de-chaussée de votre espace d’exposition, Bac à sable, une installation de 6 sculptures, lesquelles allient et confrontent matières chaudes et froides : le bois et le fer, dessine un premier cimetière d’objets manufacturés mis au ban de la société autrement dit « retraités ». Une retraite loin d’être tranquille.

En effet, 3 Moto-Cycles en phase de décomposition ont été déterrés, désensablés ou sortis des eaux. Le temps avait sculpté des pièces rares et uniques alors qu’il s’agissait au départ d’objets industriels de grande consommation. L’acte artistique consistait alors à profaner les tombeaux des objets disparus mais aussi à les transformer en accélérant notamment le processus de destruction pour les fragiliser davantage jusqu’à l’ultime déséquilibre.
Au centre de l’installation, un bac à sable mouvant aspire et invite au « je ». Le désir est aussi de faire exploser l’espace de représentation. Peut-être les gens feront-ils des pâtés dans le bac à sable et voyageront-ils sur ces montures intemporelles ? Un espace public de jeu, de liberté et de poésie est autorisé… dans votre espace d’exposition.


2. Monolithe : un second cimetière.

Contenu et démarche :

Les voyageurs s’aventureront ensuite au premier étage, pour découvrir et se perdre dans Monolithe, un second cimetière. 12 tableaux fonctionnent par paires indivisibles et dessinent les contours d’un seul bloc labyrinthique aérien.

Les glacis transparents des toiles renvoient l’image des promeneurs. Ils se projettent et se perdent dans les écrans noirs et s’étirent au fil des lignes jusqu’à la disparition éventuelle.


Au final, cette installation propose une déambulation d’un cimetière de sable à un cimetière aérien d’écrans flottants. Elle laisse libre cours aux projections et à l’imaginaire de chacun. Le spectateur devient acteur de l’exposition, fabricant sa propre histoire.





  • Détableauïdes Dépivotés




Détableauïdes dépivotés est une installation plastique et sonore. Il s'agit d'une machine fonctionnant à l'électricité, laquelle lui permet de tourner sur elle-même. Ce processus offre ainsi la possibilité de créer plusieurs niveaux de lecture. Afin de réaliser cet objet, une démarche pluridisciplinaire s'est avérée indispensable. En effet, ce travail mélange mécanique, musique, arts plastiques, poésie et ouvre la porte à d'autres univers.
La thématique globale de notre projet questionne les notions d' « écran » et d'« image » omniprésents et omnipotents dans la société occidentale contemporaine, mais aussi « l'espace de représentation ».


I. Création des détableauïdes dépivotés : notre démarche.

Tout d'abord, un travail autour des codes construisant chaque discipline a été nécessaire pour élaborer le projet. Nous avons trouvé des points communs entre musique, arts plastiques et poésie. Notamment la ligne écrite, la notation de la partition, la ligne de fuite ou le trait du dessin. Nous avons également questionné les supports utilisés dans nos disciplines : le format rectangulaire « standard » semblait prépondérant. Il suffit d'évoquer le format du livre, de la partition, de la feuille, du pupitre, du cahier d'écriture, de la feuille à dessin ou du tableau. Ainsi, peu à peu un langage spécifique  commun est né.

Ensuite, notre réflexion s'est portée sur le phénomène « écran » qui envahit nos espaces tant publics que privés et formatent nos représentations. Non seulement la partition de musique est un format écran mais aussi le tableau, l'écran de cinéma, la scène de spectacle, le mur invisible entre le spectateur et la création. La société marchande a aussi largement utilisé l'écran pour fabriquer des objets du quotidien indispensables. La construction de notre monde « visible » n'est-elle pas établie autour de l'écran d'ordinateur mais aussi autour de celui du portable, de la télévision ou de l’écran publicitaire ? Ces objets sont devenus en quelque sorte des appendices, un prolongement du corps humain. Homme « écran »?

En outre, ce phénomène écran est inscrit dans notre quotidien, il s'impose comme légitime et incontournable. La société l'a normalisé, et encourage la production d'images à des fins marchandes. Ce rôle de producteur d'images nous a troublés. En effet, le monde visible apparaît comme une succession infinie d'images retranscrites d'écran à écran. Peu à peu, il se transforme, se déforme et nous échappe. Les images prennent le pouvoir. L'homme devient assujetti à un miroir déformant, souvent marchand qui le détourne peu à peu de l'espace et du lien social "réel". La société marchande semble orchestrer consciemment et inconsciemment la déréalisation de l'homme. Homme « image »?

Pour enrichir notre recherche, nous sommes allés observer ce qui est le plus visible : les sucettes publicitaires, les panneaux, les affiches etc. Nous avons étudié les codes de présentation utilisés par l'image marchande : l'emplacement, la couleur, le mouvement et l'éclairage. Ces notions fondatrices de nos disciplines ont été récupérées et pillées. Le long des rocades par exemple, les panneaux publicitaires amovibles ont un effet hypnotique en raison du mouvement, du choix des couleurs et des lignes de force. Ils sont savamment composés. L'esthétique choisie est parfaitement maîtrisée au service du slogan. Ces « écrans slogans » ont provoqué un sentiment d'attirance répulsion très fort. De là est né le besoin de faire exploser non seulement les codes artistiques récupérés par le monde marchand mais également ceux de nos arts respectifs. Comment détourner ces codes, comment jouer avec ? Comment les annihiler ? Comment retrouver ou créer d'autres espaces de liberté ?

Au final, de cette expérimentation a surgi Détableauïdes Dépivotés. Cette installation est conçue pour détruire l'espace de représentation, les codes artistiques marchands, et simultanément inventer un espace libre, incontrôlable et surtout contournable. Cet espace n'est pas hiérarchisé ni « hiérarchisable ». Pas d'artiste homologué à son origine mais une création autonome plaçant l'individu comme acteur « d'une utopie concrète ». Cet espace poétique abolit la frontière dedans-dehors et peut surgir où bon lui semble. C'est un espace concret qui croise la notion d'hétérotopie développée par Michel Foucault dans une conférence datant de 1967 intitulée " Des espaces autres" et publiée dans Dits et Ecrits en 1984.

Comment sortir de l'espace de représentation officiel cadenassé et homologué ? Comment se réapproprier l'espace public ? Nous souhaiterions proposer notre installation hors les murs et réfléchir aux possibilités d'une mobilité quotidienne ou hebdomadaire de Détableauïdes dépivotés : dedans, dehors, sur une place publique , dans un jardin privé, une galerie, sur une péniche, un pont, dans une rue, une gare, près d'une fontaine, d'un ruisseau, dans une impasse, une cave, dans les arbres, sur un bus, un balcon, une remorque, dans une médiathèque, un bois, un cinéma, un champ, un théâtre, un parking, un musée, un quai, une casse, un lycée, un cimetière, une zone industrielle, une zone pavillonnaire, une déchetterie, une piscine, un gymnase, sur un toit... Partout et surtout nulle part.


II. Installation bancale des détableauïdes dépivotés : Espace visible, Espace invisible.


  1. Installation bancale dans l’espace public.

L’aventure commence au cœur d’une salle de l’Espace 29 à Bordeaux. Le visiteur marche sur la carte géographique de son quartier, collée au sol et pénètre à l’intérieur d’une salle vide dans laquelle il découvre le premier des 3 détableauïdes dépivotés en mouvement. Trois vélos sont à la disposition des volontaires et un parcours pour trouver des bancs sonorisés est proposé. Un message indique :

« Trouvez les bancs et prenez le temps de vous asseoir pour entendre et voir. N’oubliez pas vos écrans en tout genre. Bonne recherche bancale ! »


Il s’agit alors de partir à pied ou à vélo, en quête des bancs à dossiers créés à partir d’objets récupérés dans le quartier (lors des ateliers décrits en II. 2) puis de prendre le temps de s’y asseoir. Sur chaque banc, des clés USB serviront à télécharger une création sonore du musicien Boris Cenon réalisée à partir de son imprégnation du quartier.

L’orientation de chaque banc public donne un angle de déambulation pour trouver le prochain. À l’arrivée, les promeneurs découvrent un banc sans dossier. Ils pourront s’asseoir dans tous les sens pour chercher du regard les 2 autres détablauïdes dépivotés disposés au détour d’une rue, sur un arbre ou un toit…

Une fois par semaine, autour des bancs publics, des lectures de poésies ou des performances en lien avec la réflexion sur le territoire seront proposées. Enfin, le parcours et l’emplacement des détableauïdes dépivotés changeront tous les 3 jours ou toutes les semaines.

Ainsi, les promeneurs vont non seulement se réapproprier poétiquement l’espace public mais aussi le regarder autrement et l’interroger. Ils verront des choses qui n’appartiennent plus aux artistes. L’espace de représentation est ainsi détruit. Ces machines qui tournent sur elles-mêmes redessinent dans les lieux publics quotidiens un espace possible de rêves.

Au final, notre installation déploie « un espace autre », une utopie réaliste. Une hétérotopie existe pour reprendre les mots de Michel Foucault. L’artiste et l’œuvre sont désacralisés. L’art permet juste de s’abandonner et se perdre dans l’espace public pour retrouver sa liberté : le droit à imaginer, rêver, réinventer ou créer.
Quant aux artistes, ils poursuivent, reprennent ou complètent les recherches de certains artistes des années 70 comme Allan Kaprow ou Tinguely. Notre position est d’ouvrir un espace poétique. L’oeuvre ne nous appartient plus. Une fois l’installation mise en place, nous nous effaçons et laissons libre cours aux promeneurs. Certains griffonneront sur les bancs, inventeront, les transformeront…


  1. Travail en partenariat avec les gens du quartier : les interventions bancales.

Nous souhaiterions intervenir dans les écoles, collèges, lycées ou associations motivés pour présenter notre projet et surtout leur proposer d’y participer.

Dans l’optique d’une réappropriation poétique de l’espace public des quartiers, nous nous promènerons et récupérerons tous les objets jetés qui traînent : débris, rogatons, ou autres rebus abandonnés afin de les transformer ensuite en bancs publics.